M.M. Faiseur d’histoires – Ateliers d’écriture

Sept…

Par les élèves des classes 1COM2 et 1GA

du Lycée d’Artois de Noeux-les-Mines

Année 2015-2016

avec le concours de :

Christian QUENNEHEN – enseignant

et Michaël MOSLONKA – romancier

M.M. Faiseur d’histoires

© M.M.Faiseur d’histoires – novembre 2015.

Les auteurs

Chez les 1GA :

Clément A., Julie B., Océane C., Ketlyne D., Tiphanie D., Jessy D., Océane D., Marie F., Justine H., Tiffany K., Juliette L., Maëlle L-H., Morgan M., Estelle P., Virginie R., Romane T. et Océane F.

Chez les 1COM2 :

Gwenaelle A., Lucie B., Dylan B., Coralie B., Melissa D., Leah D., Stéphane G., Thibaut H., Abdel Ouadoud J., Marion L., Noémie L., Cécilie L., Charlotte L., Alexandre M., Margaux S., Clémence T. et Steecie V.

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Également en version PDF ici.

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Chapitre 1

Une demande aux étoiles

Il est six heures, et tout le monde dort dans la maison. Lilou entend la pluie qui claque contre les volets de sa fenêtre. Elle se lève, quitte sa chambre et descend dans la cuisine en sautant de joie, car c’est Halloween.

Ce soir, je vais pouvoir manger des bonbons, pense-t-elle, faire peur aux gens et leur montrer mon terrible déguisement de sorcière ! Je vais le mettre après avoir déjeuné ! C’est maman qui va être contente !

Lilou est une petite fille de sept ans. Elle a de longs cheveux bruns et lisses. Ses yeux verts font d’elle une fillette sage et innocente. C’est une enfant simple, qui aime s’amuser avec ses parents et son petit frère, Florent.

Elle arrive dans le salon. Dans la pièce, la chaleur est au rendez-vous. Ainsi que l’ambiance et les décorations pour Halloween : des toiles d’araignées et des citrouilles au bout d’un fil sont suspendues à l’encadrement de la porte d’entrée ; des ampoules orange et jaunes, en forme de citrouille, sont accrochées au mur ; un squelette tient debout juste à côté de la cheminée, sur laquelle est posé un chandelier.

Dans la salle à manger, les longs rideaux des grandes fenêtres sont décorés de fantômes blancs. Sous une de ces fenêtres se trouve un buffet, sur lequel sont posées des photographies encadrées de la famille de Lilou en vacances. Il y a de belles bougies à côté. La nappe de la grande table est orange, des bougies y sont aussi posées.

Lilou entend des griffes faire « clic-clic » sur le parquet.

C’est Noby !

Noby est le chien de la famille. Il a de grandes taches blanches sur sa fourrure d’un brun foncé, aux poils longs et soyeux. Quand il voit la petite, il remue la queue de joie. Il a une de ses chaussettes sales dans la gueule.

– Roh, Noby !! s’énerve Lilou. Tu me les prends toujours, lâche-la, tout de suite !!

Noby obéit et la dépose au sol. Puis il se faufile vers la cuisine.

Lilou traverse le salon et arrive à son tour dans la cuisine. Noby est assis près de sa gamelle. Elle lui donne des croquettes, puis va voir son poisson rouge, Némo, pour lui donner aussi à manger.

Némo vit dans un aquarium de taille moyenne, qui est posé sur le plan de travail. De minuscules cailloux et de toutes petites plantes vertes naturelles décorent le fond de son habitat. Il y a également un bateau pirate miniature en bois dans lequel le poisson aime se cacher. Un sapin artificiel décoré de minuscules citrouilles d’Halloween est planté dans le fond. L’aquarium est éclairé par la lumière naturelle qui traverse la fenêtre située juste en face. Le petit animal de compagnie de Lilou passe son temps à faire le tour de cet aquarium bien trop grand pour lui. Némo est d’une couleur rouge vif avec de grands yeux.

Lilou s’aperçoit qu’il nage sur le dos. Elle donne plusieurs petits coups contre la vitre afin de voir sa réaction.

Rien ne se passe, Némo ne réagit pas.

– Némo ? Eh ! Oh ! crie-t-elle en tapotant plus fort. Ça va ?

Tout à coup, une énorme bourrasque ouvre la fenêtre. La petite écarquille les yeux de peur. Elle est tellement terrorisée qu’elle se cache sous la table de cuisine. Elle comprend alors que ce n’est que le vent et va fermer la fenêtre, qui s’ouvre encore. Lilou tire directement le rideau, puis elle court dans la chambre de ses parents.

Elle secoue sa mère en hurlant :

– Maman, mon poisson ne va pas bien ! Il ne nage plus, descends avec moi !

– Lilou, va dormir, maugrée son père. Ta mère et moi, nous sommes fatigués…

Lilou est triste que son père ne l’écoute pas. Arnaud est un homme imposant aux cheveux bruns et aux yeux verts. Il porte souvent une chemise à carreaux rouges et un pantalon en jeans. Il est très sévère avec Lilou et avec son frère, Florent, car il veut que ses enfants soient bien éduqués et qu’ils aient un bon avenir.

– Maman, maman ! insiste Lilou. Il ne bouge plus, il faut faire quelque chose !

Arnaud se met en colère :

– Ton poisson n’a rien ! Il dort, tout simplement !

– Rendors-toi, mon chéri, lui dit Louise. Ne t’inquiète pas, je vais m’en charger.

Louise a trente-trois ans et déjà des cheveux gris. Elle ne se fatigue jamais malgré ses deux enfants. Lunatique, elle peut s’énerver parfois pour un rien, comme lorsque le bac à linge est mal fermé. Mais elle est aussi une mère douce et attentionnée. C’est grâce à elle que la famille est unie. Bientôt la famille s’agrandira, car Louise attend un troisième enfant. Elle décide donc d’écouter sa fille.

Louise descend dans la cuisine en robe de chambre et découvre le poisson rouge sur le dos.

– Lilou, dit-elle à sa fille d’un air triste. Némo est parti au ciel, il ne reviendra pas.

L’enfant s’effondre en larmes.

– Non ! refuse Lilou. J’ai pas envie qu’il parte.

– Je t’en achèterai un autre, ne t’inquiète pas, tente de la consoler sa mère avec douceur.

Mais Lilou ne change pas d’avis :

– Non, je ne veux pas d’un autre, je veux celui-là !

Son père arrive dans la cuisine. Il regarde Némo flotter sur l’eau.

– Viens près de papa, dit-il à sa fille. Je sais que tu es triste. Pleure si tu as envie de pleurer, ça fait du bien quand on est triste.

– Est-ce qu’on peut le garder, s’il vous plaît ? demande Lilou en pleurant.

Louise n’aime pas voir sa fille triste.

– Très bien, ma chérie, accepte-t-elle, nous allons le garder…

* * *

C’est la fin de l’après-midi, l’heure d’aller chercher des bonbons chez les habitants du quartier. Lilou a passé une partie de la journée à côté de son poisson à le supplier de revenir à la vie.

– Némo, nage, s’il te plaît ! ne cessait-elle de lui dire. Tu vas rater Halloween. Regarde : ce soir, je vais chercher des bonbons, il faut que tu reviennes pour voir tous les bonbons que je vais ramasser.

Comme Némo ne bougeait toujours pas, la petite fille est montée dans sa chambre.

Le soir venu, elle descend dans la cuisine. Toujours triste, elle n’est pas d’humeur à sortir.

Arrivée dans le salon, elle sent une odeur de fleurs. Elle essaye de trouver d’où provient cette agréable senteur. Elle regarde sur l’appui de la fenêtre et voit des roses. Sur le bouquet, elle trouve un mot : « Pour nos dix ans de mariage, je t’offre ce bouquet. Je t’aime. Arnaud. »

Elle va dans la cuisine pour se servir un verre d’eau. Une odeur de tarte à la citrouille sortie du four la fait saliver. Lilou oublie un peu sa tristesse. Elle boit son verre d’eau en se rapprochant de la tarte, puis se décide à s’en prendre une part.

– Allons chercher des friandises avec ton frère, lui propose alors sa mère.

Florent est déjà prêt. Il est déguisé en vampire. Il porte une petite cape avec un grand col, de longues dents pointues et du faux sang sur le visage. Florent a cinq ans, c’est le portrait craché de son père. Il a des cheveux bouclés et bruns comme lui et les mêmes grands yeux verts que toute la famille. Malgré ses lèvres d’un rouge tomate, tout le monde le trouve très beau. Florent est dégourdi pour son âge et très sage quand on s’occupe de lui, mais si personne ne fait attention à lui, il devient capricieux et égoïste.

– Non, maman, refuse Lilou. S’il te plaît, laisse-moi avec Némo…

– Ton poisson est parti au ciel, lui répond sa mère d’une voix tendre. Tu devrais aller t’amuser, ma chérie.

– D’accord, maman, mais pas longtemps. Je dois veiller sur Némo.

Pendant ce temps, jaloux, Florent commence à faire des caprices, car sa mère s’occupe de sa sœur et pas de lui. Il boude dans son coin, ne voulant parler à personne. Il se bouche les oreilles dès que sa mère lui parle. Noby, quant à lui, est dans son panier. Il regarde gigoter les humains en face de lui.

Lilou se prépare donc à accompagner sa maman et son petit frère. Elle s’habille en petite sorcière. Elle met sa robe puis elle se maquille. Louise lui crêpe les cheveux. Finalement, Lilou enfile ses bottines préférées, et tout le monde sort.

Louise doit s’abaisser pour passer la porte d’entrée et éviter les araignées qui pendouillent. Un détecteur de personne déclenche des cris de chauve-souris. Florent s’agrippe à sa mère en faisant semblant d’avoir peur. Louise rigole. Lilou ne dit pas un mot, elle pense toujours à Némo.

Dehors, le ciel est bas et rempli de nuages noirs. Il fait un froid glacial. Les petites bottines roses de Lilou ont des talonnettes. D’habitude, la fillette aime sauter ou taper des pieds pour que tout le monde puisse l’entendre. Aujourd’hui, elle n’en a pas le courage ni la force. Florent, lui, est très heureux de fêter Halloween avec sa sœur. Il la guide pour chercher des bonbons. Tous deux frappent aux portes.

– Bonjour, un bonbon ou un sort ? disent-ils aux gens.

Petit à petit, Lilou oublie sa tristesse et commence à s’amuser. Heureuse, elle continue sa tournée et tambourine chez les voisins. Puis le vent se met à souffler. Il souffle tellement fort que les feuilles se décrochent des arbres. Un brouillard épais envahit le quartier.

Lilou ne peut plus voir sa mère.

Ils m’ont laissée toute seule, se met-elle à penser, inquiète et apeurée. Je suis perdue.

Elle ne discerne plus que les fenêtres illuminées des maisons. Elle entend une voiture. Le bruit est proche. Elle cherche à voir quelque chose, mais il fait trop sombre. Soudain, une odeur de soufre plane dans l’air. Puis Lilou entend sa mère :

– Lilou, ma puce ? Où es-tu ? Lilou ?

La fillette effrayée l’entend et suit ses cris. Dès qu’elle l’aperçoit, elle court vers elle en pleurant.

– Oh ! J’ai tellement eu peur de te perdre, maman !

* * *

Lilou est maintenant dans sa chambre. Elle est sagement allongée dans son petit lit tout rose et fixe le plafond.

Elle pense à Némo. Elle a compris qu’il était mort. Sur son lit, il y a son doudou : un petit lapin blanc. Sur le sol se trouvent ses jouets. Les murs de sa chambre sont soit rose pâle, soit rose foncé, avec des stickers et des cadres Hello Kitty partout. Une garde-robe blanche se trouve à côté de sa porte.

Lilou n’accepte toujours pas la mort de son poisson. Tout à coup, elle se lève. Elle s’approche de son tapis de jeu où sont rangées ses poupées, sa poussette et sa mini-cuisine. Elle reste immobile pour réfléchir. Puis elle va à sa fenêtre. Elle scrute les étoiles. Émerveillée par le ciel illuminé par toutes ces étoiles, elle joint ses mains puis les lève vers le ciel.

– Je souhaite que mon poisson rouge revive, prie-t-elle en sanglotant.

Puis elle retourne dans son lit et ferme les yeux pour aller au pays des rêves.

Lilou se réveille brusquement.

Dehors, le vent souffle. Les branches des arbres cognent contre la fenêtre de sa chambre. Apeurée, la petite se cache sous sa couette. Elle en a la chair de poule.

Soudain, on frappe, frappe à la porte d’entrée. Violemment. Lilou crie de peur. L’angoisse la hante. Puis, elle décide d’être courageuse et descend au rez-de-chaussée.

Une odeur de mort plane dans l’air. Lilou se dirige vers la porte d’entrée. Petit à petit, ça sent le brûlé. L’odeur de mort devient de plus en plus intense.

Lilou ouvre la porte… et voit d’énormes bottes usées.

La fillette lève la tête. Devant elle se tient un homme. Cet homme est très grand. Elle a l’impression qu’il mesure deux mètres de haut. Elle se sent toute petite par rapport à lui. Il a de longs cheveux noirs très gras et pleins de nœuds. Ils sortent de sa capuche, dont l’intérieur est rouge. Son visage est plongé dans les ténèbres de cette capuche, et Lilou ne voit que ses yeux d’un rouge cramoisi. Il porte un long manteau noir et rouge avec une longue cape noire qui, telle une ombre, bouge au gré du vent. Prise de terreur devant cette silhouette menaçante, Lilou recule. Elle tombe sur le paillasson de l’entrée. Elle cherche à se lever, mais son corps reste immobile, comme si elle n’avait plus prise sur lui. Elle se met à hurler. L’homme habillé en rouge et noir se penche sur elle. La fillette observe au fond de ses yeux de petites flammes qui brûlent.

– Tu as quel âge ? lui demande-t-il d’une voix de fumeur.

Elle lui répond d’une voix hésitante :

– Sept ans, monsieur.

De sa manche, il sort une enveloppe rouge et la lui tend.

– Tiens. Dans cette enveloppe, tu trouveras sept cachets. Sept cachets comme ton âge. Comment t’appelles-tu, ma belle ?

– Lilou, monsieur. Mais ils vont me servir à quoi ? veut-elle savoir, terrifiée.

– Lilou, ces sept cachets vont te servir à faire revivre tout être vivant. À le tirer de son long sommeil.

Lilou hésite, puis elle tend une main tremblante. L’homme sombre et menaçant la lui prend et lui met l’enveloppe dedans. Il referme ses doigts dessus et repose son petit poing sur ses genoux. Puis il recule tout en la fixant méchamment.

Arrivé sur la route, il lève les bras vers le ciel. Un bruit assourdissant retentit. Le brouillard se lève rapidement, et tout le quartier se retrouve plongé dans la grisaille. L’homme disparaît d’un coup. La fillette est stupéfaite. L’odeur de mort se dissipe.

Sans bouger du paillasson, sur lequel elle est tombée, Lilou ne voit plus que la première marche d’entrée. Soudain, un bruit se fait entendre dans son dos. Une silhouette dévale les escaliers à toute vitesse et la prend par le bras. Lilou pousse un cri de frayeur. Une voix sûre et calme lui chuchote :

– Doucement, tout va bien.

Il s’agit de son père.

– Viens te coucher, ma puce, lui dit-il d’une voix douce.

Arnaud regarde la rue. Il y a tellement de brouillard qu’il ne voit plus la route. Il n’entend rien, le brouillard semble étouffer les sons.

– Lilou, que faisais-tu, ici ?

– J’ai entendu du bruit, papa. Alors, j’ai ouvert la porte.

Arnaud n’a rien entendu. Ni sa femme. Louise et lui étaient plongés dans un sommeil lourd et profond. Il faut dire que la veille, ils ont fêté leurs dix ans de mariage, et ils ont un peu trop bu.

Il monte Lilou dans sa chambre. Pendant qu’il la porte, sa fille garde l’enveloppe cachée entre ses mains. Une fois dans sa chambre, Arnaud la met au lit puis s’en va.

Dès qu’il est parti, Lilou regarde à l’intérieur de l’enveloppe. Celle-ci sent les larmes… comme si elle était parfumée de tristesse. Quand la fillette l’ouvre, une odeur de gaz envahit sa chambre. Apeurée, Lilou prend la pilule puis referme l’enveloppe. Elle attend que son père se soit rendormi. Dix minutes plus tard, elle redescend discrètement au rez-de-chaussée. Arrivée dans la cuisine, elle s’approche avec angoisse de l’aquarium. La pilule dans sa petite main moite, elle marche tout doucement. Elle est hésitante, mais elle veut à tout prix que Némo revienne à la vie. Elle met délicatement la gélule magique dans l’eau, puis elle regarde son poisson rouge, attendant que le comprimé fasse son effet.

Il ne se passe rien.

Triste que Némo ne se réveille pas, Lilou remonte dans sa chambre, en larmes. Elle retourne dans son lit en serrant très fort son lapin en peluche contre elle et plonge dans un sommeil agité.

* * *

Lilou se réveille, son estomac gargouille. Elle a faim. Il fait toujours nuit. Ses pensées se tournent tout de suite vers Némo. Elle quitte son lit et sa chambre pour aller vérifier s’il va mieux.

Arrivée à l’avant-dernière marche, Lilou s’arrête. Elle sent une forte odeur d’humidité qui imprègne les murs du salon. Lilou commence à grelotter, il fait affreusement noir et froid. Elle pose le pied sur le parquet, son sourire s’éteint. Un courant d’air froid plane sur le sol. Sa peur monte. Les silhouettes des branches des arbres situés devant la maison se reflètent sur la tapisserie de la pièce. Une épaisse odeur de citrouille, de cire et de brûlé règne dans la pièce.

Lilou file vite dans la cuisine.

Une fois arrivée, elle se dirige directement vers l’aquarium et, surprise, Némo bouge !

La fillette est émue et contente. Son poisson rouge revit. Elle va le voir.

– Coucou ! lui dit-elle. Ça va ? Tu te sens mieux ?

Mais il y a comme un problème… Il manque une nageoire à Némo.

Ben pourquoi il lui en manque une ? se demande Lilou. Comment elle a disparu ?

Lilou ne se pose pas plus de questions. Trop heureuse que son poisson revive, elle court à l’étage pour le dire à ses parents. Son père et sa mère se réveillent en sursaut. Lilou leur explique tout.

– Lilou, il fait nuit…, lui dit sa mère. Tu fais peut-être juste un rêve, ma puce…

– Mais mon poisson s’est réveillé…

Son père pense que ce n’est qu’un mensonge.

– Arrête de raconter des bêtises ! lui dit-il. Va te coucher !

– Maman, papa ! insiste Lilou. Venez voir, je vous promets que Némo s’est réveillé ! S’il vous plaît, s’il vous plaît !

Ses parents se regardent, puis acceptent de descendre.

En découvrant le poisson de nouveau en vie, ils restent stoïques et se disent que Némo n’était peut-être pas mort. Il s’est certainement mis sur le dos le temps d’un instant.

Lilou est déçue de la réaction de son père et de sa mère.

* * *

Après le petit déjeuner, Lilou monte dans sa chambre pour choisir ses habits. C’est à ce moment-là que Florent vient la voir.

– Cette nuit, j’ai entendu « toc-toc » à la porte ! explique-t-il à sa grande sœur. Il y avait une odeur bizarre. Je voulais venir te voir, quand j’ai entendu la voix d’un homme. Je me suis caché derrière le mur et j’ai tout écouté !

Il est convaincu que quelque chose de bizarre s’est passé dans l’aquarium, alors, intrigué, il interroge sa sœur :

– Pourquoi y renage, Némo ? Il a fini son dodo ?

Lilou lui raconte tout :

– Un homme grand, très bizarre m’a donné des cachets. Il m’a dit qu’ils peuvent réveiller d’un long sommeil. Ils sont magiques !

Florent est super content et excité à la fois. Lilou est rassurée que son petit frère croie en elle. Elle poursuit donc :

– Papa m’a mise au lit, mais, après, je suis descendue donner un cachet à Némo. Le revoilà en vie !! Mais tu dois rien dire aux parents, promis ?

Florent est impressionné que ces pilules aient vraiment fonctionné.

– Promis que je dirai rien à maman et à papa, la rassure-t-il en la serrant dans ses bras.

Le lundi matin, la mère de Lilou est seule. Les enfants sont à l’école et son mari est parti travailler. Louise commence par faire la vaisselle du petit déjeuner, puis elle sort le poisson de l’aquarium à l’aide d’une petite épuisette et le dépose dans un bol d’eau. Elle enlève également les minuscules cailloux de décoration, les plantes vertes, le bateau pirate miniature et le sapin artificiel qu’elle met dans l’évier, puis elle les nettoie avec une brosse. Dès qu’elle a terminé, à l’aide d’une pompe, elle retire le liquide, qui se retrouve dans un saladier. Elle prend une éponge mouillée puis frotte l’aquarium dans tous les coins. Elle replace toutes les décorations dedans et verse de l’eau propre avec un bidon. Elle finit par reprendre le poisson avec l’épuisette et le remet à sa place.

Puis elle prend le saladier et vide l’ancienne eau de Némo dans l’évier…

Chapitre 2

La mort de Noby

Les semaines passent, c’est l’anniversaire de Lilou. La fillette le fête avec ses amis. Quand ces derniers arrivent, ils ont plein de cadeaux à la main. Ils voient sur la façade de gros ballons Hello Kitty ainsi que des ballons blancs et roses. Une banderole annonce « Joyeux anniversaire ! » Le portail blanc est décoré comme s’ils allaient entrer dans un château. Des nœuds papillon sont accrochés sur ses barreaux, et une petite pancarte, sur laquelle est inscrit « bienvenue à la fête ! », les accueille.

Une fois qu’ils sont entrés à l’intérieur du « Château de la Princesse », Louise et Arnaud prennent les cadeaux destinés à Lilou pour que leur fille puisse jouer avec ses amis. Ils les portent à bout de bras à l’intérieur de leur maison jusqu’au fauteuil du salon. Pendant ce temps, Lilou emmène ses amis dans le jardin. Elle a préparé des activités pour s’amuser et rigoler avec eux.

Dans le jardin de derrière, il y a un trampoline et une balançoire, ainsi qu’un petit chalet en bois. Deux trottinettes et plein d’autres jouets qui appartiennent à Lilou, à son petit frère et à Noby sont éparpillés dans tous les coins. Les amis de la fillette les prennent et commencent à jouer avec. Ils font des courses avec les trottinettes et ils exécutent des saltos sur le trampoline. Certains enfants commencent à imiter… un fantôme ! Tout le monde crie et se cache.

Tout au fond du jardin, il y a un poulailler et des lapins. Quand ils voient le poulailler et les clapiers, les amis de Lilou cessent de jouer aux fantômes. Ils courent tous vers les animaux pour pouvoir les caresser. Ils crient « Cot cot ! » et ils essayent d’imiter le lapin, puis ils donnent à manger aux animaux.

Dans le garage, le père de Lilou allume le barbecue. Il fait cuire des saucisses. C’est Florent qui a voulu ce repas. C’est son repas préféré.

– Les enfants ! appelle Louise. Venez manger !

Les amis de Lilou cessent de jouer et entrent dans la maison en criant : « Ouiiii ! » Ils sentent l’odeur des bonbons et des boissons et se jettent vers la table.

Lilou allume la musique et commence à danser. Les autres enfants descendent de leur chaise et se précipitent sur la piste de danse.

* * *

Tous les amis de Lilou sont partis.

La fillette déguste un dernier morceau de saucisse devant l’aquarium de Némo, dans la cuisine. Ses parents sont dans le salon en train de tout nettoyer. Des confettis recouvrent le canapé et le plancher. Du gâteau est écrasé sur les murs. Des gobelets et des assiettes sont éparpillés dans toute la maison, qui ressemble à un champ de bataille.

Soudain, Lilou entend un bruit suspect dehors.

Poussée par la curiosité, elle se rend dans le jardin.

Le ciel est devenu gris, le vent s’est levé. Les arbres bougent, et la porte du cabanon claque. L’escarpolette de la balançoire se met à grincer. Lilou s’en approche quand une odeur d’animaux morts lui agresse les narines. La puanteur est tellement forte qu’elle ne peut la supporter. La fillette masque son nez avec sa main. Un fort parfum d’urine commence à se faire sentir. L’odeur se dégage des buissons qui poussent au fond du jardin.

Lilou a un très mauvais pressentiment.

Elle avance et découvre Noby, qui est allongé. Son chien laisse échapper de petits jappements de douleur. Des larmes coulent de ses yeux. De la mousse dégouline de sa truffe et de sa gueule, qu’il ne cesse d’ouvrir et de refermer. Sa langue est déchiquetée par les coups portés par sa mâchoire comme s’il avait voulu se la manger. Des gouttes de sang en ruissellent et finissent leur course sur l’herbe fraîchement tondue. Le corps de Noby tressaute. Sa queue fouette le sol, puis elle cesse de bouger. Sa gueule se referme, ses yeux se retournent. Il est immobile. Sa mort est certaine… Lilou s’effondre en sanglots. Pas moyen de s’arrêter, puis elle voit un petit caillou qui lui rappelle les pilules magiques.

La jeune fille ramasse délicatement Noby, elle le prend dans ses bras pour l’emmener dans sa chambre. Elle fait le tour de la maison, passe la porte d’entrée, mais il y a un problème : ses parents sont toujours là, occupés à nettoyer la pièce. La petite traverse quand même le salon. Elle dit à ses parents que son petit chien dort et qu’elle va jouer à la maman avec dans sa chambre. Louise et Arnaud la croient.

Arrivé dans sa chambre, Lilou allonge Noby au bout de son lit et installe une couverture sur lui pour qu’il n’ait pas froid. Elle glisse une couette sous son lit, pose son petit chien dessus avec le lapin blanc, son doudou préféré. Elle veut qu’ils soient ensemble, car elle les aime tous les deux. Et pour bien les cacher, elle fait tomber ses draps de son lit jusqu’au sol. Puis elle va vers sa commode de nuit, l’ouvre et prend la poupée russe dans laquelle les comprimés sont cachés. Elle se faufile vers son chien. Elle ouvre ses mâchoires, se pince le nez pour ne pas sentir l’odeur. Elle enfonce la gélule au fond de sa gorge puis referme sa gueule. Elle espère que la pilule magique fera son effet.

Elle s’allonge sur son lit et attend que quelque chose se passe. Finalement, elle s’endort sans que rien ne soit arrivé.

* * *

La nuit est venue.

Lilou est toujours en train de dormir. Ses parents ne l’ont pas réveillée, car elle s’est bien amusée et elle doit être très fatiguée de sa journée.

Lilou se réveille en sursaut. Elle croit avoir entendu des cris d’enfants et des aboiements. Dehors, les branches des arbres se balancent de tous côtés. Des bruits étranges résonnent dans sa maison. Des genres de petits pas, des grincements et des craquements. Les bruits se répètent, puis s’arrêtent.

La fillette sort discrètement de son lit et se penche pour regarder en dessous. Son chien n’est plus là. Lilou est perdue, elle se demande où est Noby, elle ne sait pas vraiment quoi penser. Elle quitte sa chambre sur la pointe des pieds. Elle ne veut pas faire de bruit, car elle est effrayée par les petits pas et les grincements qu’elle a entendus. Elle se dirige vers les escaliers, qu’elle descend tout doucement, marche après marche, pour ne réveiller personne. Elle arrive dans le salon, où rien n’est allumé. Seule dans le noir, elle ne bouge pas. Elle respire très lentement. Dans l’attente de nouveaux bruits, elle avance, pas à pas. Elle se retrouve devant la fenêtre qui donne sur le jardin. Elle est ouverte. Le vent fait bouger les rideaux.

– C’est bizarre…, chuchote Lilou.

Elle regarde dehors, elle ne voit que sa balançoire s’agiter. Tout à coup, elle entend un petit grognement provenant de derrière elle. Elle tourne la tête et découvre son chien.

Noby se tient assis à côté de la table basse. Il a une chaussette sale dans sa mâchoire. Il remue la queue. Lilou explose de joie, et des larmes coulent de son visage. Elle est tout sourire. Heureuse de retrouver son chien, elle le serre fort dans ses bras.

– Tu m’as manqué, mon Nono ! Je te protégerai et je te cajolerai tous les jours, mon chien !

« Nono » aboie. Un ver de terre lui sort de l’oreille. Il tombe sur le bras de Lilou. Noby le voit. Il lâche la chaussette et avale le ver d’un coup de langue.

Trop heureuse, Lilou ne se rend compte de rien. Elle prend son ami de compagnie et l’amène dans sa chambre pour se rendormir avec lui.

* * *

Pendant les semaines suivantes, Lilou s’est appliquée à donner à manger à Némo. Elle est un peu triste, car il lui manque une nageoire. Elle s’occupe aussi de son chien en le promenant le soir, avant le souper, comme s’il n’avait jamais été empoisonné. Elle est heureuse avec son chien et son poisson. Mais un jour qu’elle est assise, tranquillement, dans le canapé du salon en train de prendre son goûter tout en regardant la télévision, elle entend son chien hurler !

Son cri vient de la rue.

Elle se presse d’aller dehors.

Elle découvre Noby sur la route.

L’animal est allongé au milieu d’une mare de sang. Sa patte arrière gauche fouette l’air. Le sang gicle de son cou. Sa cage thoracique a explosé. Ses boyaux sortent de son ventre déchiqueté. Sa tête ne tient plus que sur un tendon. Puis Noby s’immobilise. Il est mort. Lilou s’effondre et pleure toutes les larmes de son corps.

– Ne me laisse pas toute seule, mon Nono, lui dit-elle, mon meilleur ami, mon chien fidèle.

Elle pense à la pilule magique. Elle monte dans sa chambre pour en prendre une. Elle revient et dit à son chien :

– Je vais te sauver encore une fois. Avale ça, ça va te guérir !

Elle met la pilule dans la gueule de Noby. Ne sachant plus quoi faire ensuite et ne voulant pas laisser Noby sur la route, elle décide d’aller chercher sa mère.

– Oh, pauvre Noby ! s’exclame Louise, horrifiée, en découvrant le corps du chien.

Elle prend sa fille dans ses bras et lui cache les yeux.

– Je suis navrée Lilou…, lui dit-elle. On ne peut rien faire pour lui.

Elle câline et embrasse Lilou, qui ne cesse de pleurer.

– Ne pleure pas, ça va aller, la console Louise, triste de la voir en larmes. S’il le faut, on en rachètera un autre.

Lilou hésite, elle est déchirée par rapport à la solitude qu’elle ressent et le fait de remplacer son chien qu’elle aimait tant. Florent est sorti, lui aussi. D’abord, il ne comprend pas. Il voit sa mère triste, sa sœur pleurer. Puis il voit Noby.

– Maman, est-ce que Noby, il va dormir toute sa vie ?

Elle le prend, à son tour, dans ses bras. Lui cache aussi les yeux.

– Oui, Florent. Il est parti au paradis. Ne t’inquiète pas, il sera bien là-bas. Il pourra dormir tant qu’il voudra.

Puis elle ramène ses deux enfants dans leur maison et les monte dans leur chambre pour jouer avec eux.

* * *

Lilou marche vers le fond du jardin, accompagnée de ses parents et de Florent. Ils vont y enterrer Noby. Triste, la fillette tient un panier dans lequel se trouve le corps de son petit chien.

Ils se dirigent vers le trou qu’Arnaud a creusé. Lilou commence à hurler quand son père lui prend Noby pour l’enterrer. Arnaud et Louise se regardent en pensant qu’elle s’en remettra vite, mais le doute s’installe quand ils voient qu’elle s’agenouille sur la tombe et continue de hurler.

Louise se dirige vers sa fille pour la réconforter, mais rien n’y fait : Lilou refuse d’être consolée. Elle pleure et rejette la faute sur sa mère.

Quelques jours plus tard, Lilou va au fond du jardin et dépose une fleur sur la tombe de Noby. Elle s’accroupit et lui dit :

– Je sais que tu vas revivre. J’en suis sûr, tu es mon chien et je t’aime.

Sa mère l’appelle pour aller faire des courses, Lilou accepte de mauvais cœur. Une heure plus tard, toutes les deux reviennent. Lilou entend un aboiement. Elle court vers le jardin. Elle pense que Noby est revenu à la vie, mais la tombe est intacte. Elle ferme les yeux et essaye d’y croire. Elle les rouvre : la tombe est toujours intacte, et il n’y a aucune trace de son chien. Lilou en a les larmes aux yeux. C’était une hallucination. Elle comprend que la pilule magique ne fonctionnera plus sur son chien.

Les jours suivants, la fillette se réconforte auprès de son poisson rouge. Elle le chouchoute, lui donne à manger et joue avec. Son père a construit un grand bassin dans le jardin. Elle prend Némo et va le mettre dans l’eau. Elle se demande comment son poisson peut résister au froid de l’eau, puis elle hausse les épaules et dit à voix haute :

– Après tout, peu m’importe, le principal, c’est qu’il soit là.

Chapitre 3

Un bébé, un décès

C’est le 24 décembre, il est midi.

Des guirlandes rouges et blanches illuminent la façade de la maison de Lilou. De grands pères Noël décorent le jardin, ainsi que des sapins avec des guirlandes, des boules et une étoile dorée. Un petit père Noël, posé sur l’appui de la fenêtre, semble regarder les enfants afin de savoir s’ils sont assez sages pour mériter leurs cadeaux. Une grande crèche, éclairée par des lumières blanches, est installée au milieu du jardin.

À l’intérieur de la maison, dans le salon, se trouve un grand sapin décoré de guirlandes rouges et blanches, d’une étoile blanche, de boules rouges, de petites figurines d’anges et de guirlandes lumineuses blanches. À son pied ont été placés les chaussons des enfants et un dessin de leur part. Sur la table du salon, Lilou et Florent ont préparé, en avance, un verre de lait et des biscuits pour le père Noël.

Dans toute la maison, on entend de jolis chants de Noël. Des petits pères Noël sont placés un peu partout dans toutes les pièces. Le long de la cheminée pendent des bottes rouges portant les prénoms de toute la famille. Un feu fume dans la cheminée et dégage une bonne odeur de bûches en train de brûler. On entend le souffle de l’âtre.

Une odeur de bouchées à la reine emplit le salon. Il est temps de se mettre à table !

Lilou s’installe avec son frère et ses parents. Elle hume cette bonne petite odeur. Louise sert d’abord ses enfants. Elle a le visage cerné. Le blanc de ses yeux verts est très rouge. Elle ne dort pas beaucoup à cause des contractions du bébé. Une fois qu’elle a fini de servir tout le monde, y compris elle-même, Louise s’assoit en soufflant :

– J’espère que vous allez vous régaler. Bon appétit à tous !

Ensuite, elle se plaint :

– Qu’est-ce que je suis fatiguée…

– Va te reposer, lui dit Florent, tu as assez fait du bon travail.

– À partir de demain, Flo et moi, nous allons t’aider à préparer à manger ! décide Lilou.

– Oui, maman, accepte Florent, nous serons là pour t’aider !

Arnaud les interrompt :

– Les enfants, votre mère a une super nouvelle à vous dire !

Lilou et Florent commencent à crier de joie et à parler en même temps :

– Que se passe-t-il ?

– Quoi comme surprise ?

Puis Lilou réfléchit. Elle pense avoir une idée et propose :

– Le bébé va bientôt arriver, c’est ça, maman ?

Louise prend le temps de répondre, afin de garder un peu de suspense, puis répond :

– Oui, le bébé va bientôt arriver !

Après ce léger petit repas et cette bonne nouvelle, direction le marché de Noël !

À l’entrée, Lilou est émerveillée par les lumières, les grands sapins colorés, les chants et les bonnets de Noël. Un père Noël fait des photos avec des enfants, auxquels des lutins offrent des bonbons en chocolat. L’air embaume d’odeurs de petits pains tout chauds, de marrons et de chocolat chaud.

Lilou demande à Florent :

– Demain, c’est Noël, tu veux quoi par le père Noël ?

Le petit garçon s’écrie :

– Moi, j’veux un n’avion qui vole ! Et toi, Lou, tu aimerais avoir quoi, toi ?

– Je sais pas…

Son frère réfléchit et propose :

– Un chien zombie ?

– Ne parle pas de chien zombie ! lui crie Lilou. Ça n’existe pas !

– Le père Noël, il va avoir trop peur de le mettre dans son traîneau ! réplique Florent.

Lilou a expliqué à son petit frère qu’elle avait fait revivre Noby grâce à une pilule magique. Florent l’a crue, mais quand Noby a été écrasé par la voiture, celui-ci n’est pas revenu. « Peut-être que la pilule ne fonctionne qu’une fois par être vivant ? » a-t-elle dit à Florent.

Arnaud intervient :

– Ça suffit, vos bêtises ! Et arrêtez de vous disputer !

Soudain, Lilou ressent un mal-être, comme si quelqu’un l’observait. Les stands dégagent une odeur chaude de sucre brûlé. Le vent devient glacial. Lilou s’est habillée d’une jupe rose, que le vent fait voler. Pas très rassurée, la fillette veut se blottir contre sa mère, mais ses parents et son petit frère ne sont plus là…

Lilou cherche après eux. Elle passe devant la patinoire et devant la crèche vivante. Entre-temps, la neige commence à tomber. La fillette est désorientée. Angoissée, elle change de direction. Elle finit par se perdre. Il fait de plus en plus froid, le vent siffle entre les chalets. Il souffle affreusement fort. Les sapins bougent violemment. Lilou ne sait plus quoi faire. Elle arrive devant un chalet sombre dont les volets claquent au vent. Le brouillard tombe et le marché de Noël devient lugubre.

Lilou se met à l’abri. La neige se calme. La fillette reprend ses recherches et fait à plusieurs reprises le tour du marché de Noël. Elle cherche, mais personne. Elle cherche et recherche et finit par retrouver sa famille juste à côté du carrousel. À la vue de ses parents, elle court jusqu’à eux et se jette dans leurs bras en leur disant :

– Je me suis perdue dans le marché, j’ai eu tellement peur !

– Lilou, lui dit sa mère, tu n’as pas le droit de te sauver comme ça. On était inquiet.

– Maintenant, intervient son père, tu nous donnes la main et tu ne nous lâches plus.

Le vent souffle encore plus fort, et voilà que les volets de certains chalets se mettent à claquer quand Lilou et sa famille passent devant les cabanons.

– Nous rentrons tout de suite à la maison ! décide Arnaud.

Florent est déçu. Pas Lilou. Elle n’a plus envie d’être ici.

Louise regarde ses enfants d’un air sérieux et leur fait une promesse :

– Les enfants, je vous emmènerai de nouveau au marché dès que le temps sera meilleur.

Florent regarde sa mère avec un grand sourire et crie :

– Ouiiii !!

Un gros craquement se fait entendre. Un sapin tombe devant Lilou.

Les yeux grands ouverts, étonnés, Lilou et Florent s’immobilisent.

– Vous n’avez rien, les enfants ? se récrie leur mère, sous le choc.

Un autre sapin prend feu.

– Les enfants, venez ! leur dit leur père.

Ils quittent les lieux en vitesse pour rejoindre leur voiture.

Lilou et Florent ont du mal à courir avec toute la neige qui continue de tomber. Louise se retourne et les prend par la main. Lilou sent une odeur de brûlé familière. Florent aperçoit quelque chose au-dessus de sa tête. Soudain, Louise s’effondre.

Lilou se met à genoux devant sa mère.

Louise ne va pas bien. Elle est devenue très blanche, et ses yeux se sont retournés. Tout autour d’elle s’étalent des flaques de sang.

– Qu’est-ce qui arrive à maman ? s’écrie Lilou, paniquée. Maman ? Maman ?

Elle pleure devant sa mère en lui tenant la main.

Son père téléphone aux secours. L’ambulance arrive très vite. Quand Louise part à l’hôpital, Lilou veut la suivre, mais les ambulanciers n’acceptent pas.

* * *

Lilou et Florent attendent, seuls, à l’accueil des urgences. Une infirmière est présente avec eux. Lilou pleure. Elle a des trous de mémoire à cause du stress. Pendant ce temps, le docteur qui s’est occupé de Louise, monsieur Bernet, va voir le père de Lilou. Il marche doucement vers lui.

Arnaud se précipite à sa rencontre.

– Alors, docteur ? Comment va ma femme ? veut-il de savoir. Quand va-t-elle sortir du bloc ?

– Asseyez-vous, je vais tout vous expliquer…, lui dit le médecin.

Arnaud s’assoit et commence à s’inquiéter. Les larmes lui montent aux yeux. Il serre les mains.

Le docteur Bernet lui annonce :

– J’ai une mauvaise nouvelle. Je suis désolé, votre femme est décédée pendant l’accouchement. Mais votre fils est en vie, il est en très bonne santé.

Arnaud tombe sur les genoux, en larmes. La colère monte en lui. Il se relève et s’en prend au médecin. Il crie de colère et de douleur :

– Non ! Non ! NON !! C’est faux, totalement FAUX !

– Arrêtez, monsieur ! Calmez-vous !

– Vous mentez, docteur ! Vous mentez ! Vous mentez ! Vous êtes une ordure ! Vous ne dites que des conneries !!

Des infirmiers arrivent en courant pour le maîtriser. Le père de Lilou s’effondre en larmes avant de repartir, une seconde fois, en crise. Les infirmiers contiennent sa fureur, et le médecin en profite pour lui injecter un calmant. Ce qui l’endort pendant un petit moment.

Quand Arnaud se réveille, il a retrouvé son calme.

Il revient vers ses deux enfants. Lilou comprend tout de suite.

Elle court vers son père et éclate en pleurs. Le docteur Bernet est présent. La fillette demande à voir le bébé, le médecin le lui autorise.

Une fois devant lui, Lilou pleure de plus en plus sans s’arrêter, car son nouveau petit frère ne pourra jamais connaître leur mère. Arnaud la rejoint. Il serre sa fille contre lui, puis il prend le bébé dans ses bras.

Pendant ce temps, l’infirmière réconforte Florent. L’air choqué et triste, le petit garçon regarde autour de lui et voit des affiches. Sur l’une d’entre elles, un poisson nage dans un bocal. Florent se rappelle de l’homme vêtu en noir et rouge qui a donné les pilules magiques. Il demande à l’infirmière pour descendre.

Une fois posé au sol, Florent court rejoindre sa sœur et lui dit :

– On pourrait donner les pilules à maman, non ?

Lilou esquisse un sourire.

* * *

L’enterrement de Louise est dans quatre jours, mais, avant, a lieu la veillée funéraire. C’est la nuit. Lilou et Florent sont devant le cercueil de leur mère. Son corps a été installé dans le salon. Arnaud dort, assommé par les cachets qu’il prend avec de l’alcool.

Les deux enfants se regardent.

– Toujours d’accord ? se disent-ils.

Ils se répondent « oui » en faisant un signe de la tête.

Florent a très peur de donner la pilule magique à leur mère, car c’est un cadavre. C’est donc sa sœur qui s’en charge. Elle ouvre délicatement la bouche de Louise, mais elle est très stressée. Finalement, ça y est, c’est fait, Lilou a donné le cachet magique !

Les jours suivants, rien ne se passe.

Lilou et Florent ne voient pas les yeux de leur mère se rouvrir.

Lilou est effondrée, car elle se rend compte que la pilule magique n’a aucun effet sur les humains. Florent ressent de la haine contre sa sœur, car elle lui a menti. Il est tellement déçu de ne pas voir sa mère revivre. Il y croyait vraiment. Lilou ne sait pas comment réagir vis-à-vis de lui.

Chapitre 4

Un réveillon sans mère

Après l’enterrement de Louise, Lilou et Florent ont arrêté l’école pendant quelques mois. Florent demandait sans cesse où était sa « môman », voulant savoir quand elle rentrerait. Il a décidé d’aller voir Lilou pour qu’elle lui explique pourquoi sa maman ne reviendra pas, et, finalement, sa colère vis-à-vis de sa sœur a diminué.

Lilou pleurait souvent et regardait en boucle les photographies de sa mère. Dans leur maison, il règne désormais une ambiance triste et silencieuse. Leur père, en pleine dépression, a arrêté de travailler. Il n’y arrivait plus. Pour lui, avec la mort de sa femme, il a tout perdu. Il pleure beaucoup. Pour aller mieux, il prend des cachets, mais aussi de l’alcool.

Un an s’est écoulé. Nous sommes le 24 décembre, tout le monde pleure dans son coin. Théo, le petit bébé, qui a un an aujourd’hui, ne comprend pas ce qui se passe, mais il ressent la tristesse de son père, de son frère et de sa sœur. Il ressent aussi un manque, celui de sa mère. Il pleure beaucoup et tend ses bras vers Lilou dès qu’il la voit.

Lilou s’est enfermée dans sa chambre. Florent veut aller la voir, mais Lilou n’en a pas envie. Elle préfère rester toute seule. Il est rendu midi, leur père a préparé la dinde. Il appelle tout le monde.

Lilou et Florent rejoignent le salon et s’installent à table. Théo se met à pleurer, Arnaud lui donne le biberon. Pendant ce temps, Lilou et son frère terminent de manger. Une fois fini, Lilou embrasse son papa et retourne vite dans sa chambre. Elle s’allonge sur son lit. Elle branche ses écouteurs et se plonge dans de la musique qui lui fait penser à sa maman.

À 16 h, toute la famille se réunit autour de la table pour goûter. Le petit Théo prend aussi son goûter. Leur père demande à Lilou et à Florent s’ils veulent aller au magasin. Personne n’est partant. Tout le monde repart dans son coin. Lilou s’isole à nouveau. Florent continue à vouloir aller avec elle. Finalement, Lilou accepte. Elle lui fait un câlin, il a besoin d’attention. Il finit par s’endormir sur elle.

À 19 h 30, l’heure du souper, Lilou le réveille. Pour leur père, un repas vite fait suffit. C’est de la soupe. Ensuite, toute la famille se dit bonne nuit et part se coucher. Florent rejoint sa sœur dans sa chambre. Ensemble, ils regardent les photographies de leur mère. Les larmes coulent le long de leurs joues. Arnaud monte les escaliers et entend leurs pleurs. Il ouvre la porte et prend ses deux enfants dans ses bras pour les consoler.

Pendant ce temps, monsieur Dubois, le voisin, vient apporter quelques jouets pour Lilou, Florent et Théo. Il traverse leur jardin lourdement chargé de petits et de grands cadeaux enrobés de papier cadeau qui brille. Soudain, il entend des grognements qui viennent de derrière lui.

Il s’arrête net. Il se retourne lentement et aperçoit une ombre. C’est…

… le chien de Lilou qui se tient devant lui !

Noby est plein de terre. De la bave verdâtre dégouline de sa bouche. Il a des morceaux de peau en moins. Il lui manque une oreille. Des vers sortent de ses plaies et de ses grandes oreilles. Son œil de droite est exorbité, rouge. L’autre est manquant.

Monsieur Dubois devient blanc de peur. Des gouttes de sueur coulent de son front. Noby remue la queue. Il a l’air content.

Le chien de Lilou prend son élan et se jette sur monsieur Dubois, qui lâche les cadeaux et crie de toutes ses forces. Noby lui saute au cou et lui arrache la gorge. Son sang gicle. L’homme tombe. Noby lui déchiquette le visage. Il lui arrache la chair et la mange, puis il recule.

Le voisin gît, mort, dans l’herbe. Du sang coule de son cadavre mutilé. Des bouts de chair pendent de son ventre. Plusieurs autres chiens se réunissent près de Noby et mordent le corps du voisin encore chaud. Le sang les excite. Ils en deviennent fous et finissent par dévorer monsieur Dubois.

* * *

La nuit du 24 décembre est calme et étoilée. Lilou est descendue dans le salon, elle ne parvenait pas à trouver le sommeil. Elle regarde la télévision, mais celle-ci n’arrête pas de grésiller. La petite fille a très peur de ces grésillements.

Pourquoi il se passe tout ça depuis que j’ai les pilules magiques ? se demande-t-elle.

Entendant du bruit venant de l’extérieur, Lilou se rapproche de la fenêtre. Elle observe discrètement ce qui se passe dans la rue.

Dehors, le temps commence à se couvrir d’épais nuages gris. Un brouillard s’installe dans tout le quartier. Puis il se lève, et Lilou découvre que la rue est envahie de personnes et d’animaux. Tous sont à moitié décomposés. Elle voit leurs os. Ils sont couverts de terre. Certaines personnes ont perdu un œil, tandis que d’autres ont un membre en moins ou n’ont plus leurs bras. Elles ont une longue chevelure qui s’emmêle et cache une partie de leur terrifiant visage. Leurs habits sont arrachés. Les animaux se traînent sur leurs pattes postérieures. Des chiens et des chats marchent à côté de leurs maîtres.

Les créatures avancent en groupe. Lilou entend leurs membres craquer très très fort malgré la vitre de la fenêtre. Elle aperçoit sa mère qui déambule parmi cette grande foule de morts-vivants. Louise a la peau très blanche, et ses yeux sont retournés. La fillette court directement dans la chambre de son père. Elle saute sur son lit en poussant un cri perçant.

Arnaud se réveille en sursaut.

– Lilou, qu’est-ce que tu as ? s’écrie-t-il, alarmé. Qu’est-ce qui se passe ?

– Papa, viens vite voir, il y a maman, dehors ! lui crie-t-elle. Elle est vivante !

Arnaud se calme, puis il se lève doucement.

– Mais non, tu as juste fait un mauvais rêve. Qu’est-ce que tu as vu, ma puce ? Explique ton cauchemar à papa.

Aucune réponse ne sortant de la bouche de sa fille, il va à la fenêtre et comprend que ce n’est pas le cas. Lilou n’a pas fait de cauchemar. Horrifié, il devient tout blanc. Il regarde la scène, comme hypnotisé. Ahuri, il n’arrive pas à croire qu’il voit le cadavre de sa femme déambuler dans la rue.

Louise marche en direction de leur maison. Elle s’est munie d’un bidon d’essence.

Arnaud reste figé sur place, jusqu’au moment où il entend le verrou de la porte d’entrée se déverrouiller. Ce bruit claque dans le silence total de la maison, comme si quelqu’un venait de tirer avec une arme à feu.

Lilou veut aller rejoindre sa mère, comprend-il.

Il se précipite au rez-de-chaussée.

Une odeur de pourriture a envahi le salon. Lilou se tient devant la porte d’entrée, qui est grande ouverte. Arnaud fonce vers elle pour la refermer.

Noby est assis sur le seuil. Il fixe sa petite maîtresse avec un regard d’un noir intense. Il grogne. Il a soif de sang. Lilou se rapproche de son chien, tend la main pour le caresser, mais le cerbère tente de la mordre.

Arnaud intervient et se place entre sa fille et l’animal.

Il tente de chasser le chien mort-vivant en faisant de grands gestes. Mais Noby lui saute à la gorge, lui arrachant la jugulaire. Le sang gicle de partout. La porte blanche de l’entrée devient rouge et vire au noir. Puis l’animal enragé s’attaque au visage d’Arnaud.

Lilou est sous le choc. Soudain, elle entend Florent derrière elle.

Terrifié et dégoûté, son frère est en train de regarder la scène puis il se met à crier :

– Ahhh ! J’ai du sang sur moi. AHHHH ! AU SECOURS !

Lilou le pousse à l’intérieur et ferme la porte à double tour en pleurant.

– Lilou, demande Florent, il a fait quoi, le chien, à papa ?

Sa sœur ne répond pas. Dehors, les morts-vivants crient. Des grattements se font entendre, derrière la porte. Lilou et Florent entendent leur prénom. Ainsi qu’un bruit de mâchoire qui claque. Ils se dépêchent de courir vers la fenêtre pour savoir qui les appelle. Ils découvrent leur mère sur le seuil. Il s’agit de sa voix. Puis ils entendent « Ouuuuh, Ahwww, Ohhtch ». Les autres morts-vivants se sont approchés et claquent les volets. L’un d’entre eux essaye d’entrer dans la maison en défonçant la porte à coup de tête. Un autre est muni d’un couteau et ne cesse de l’enfoncer dans la porte. Louise se fait bousculer. Elle s’écarte et crie de frustration.

Lilou et Florent la voient qui vide son bidon d’essence partout autour de leur maison. Elle prend plusieurs allumettes dans sa poche et les lance, une par une, sur son ancienne demeure. Les flammes rouge-orange avalent complètement la porte d’entrée et la façade. Les décorations de Noël fondent. Le sapin planté dans le jardin s’enflamme et disparaît sous une vague de feu.

Alertés, les voisins sont sortis. Mais ils se font attaquer par les morts-vivants, qui leur arrachent la tête, les yeux et les bras. Quelques-uns parviennent à se sauver. Les morts-vivants, attirés par leur chaleur corporelle et leur sang, les poursuivent et les dévorent.

Derrière la fenêtre, Florent hurle de peur, choqué. Lilou cache sa peur. Elle ne veut pas que son frère voie son inquiétude. Elle essaye de le rassurer avec des mots doux. Tout à coup, elle entend Théo crier à l’étage. Terrorisée, Lilou attrape Florent. Elle lui dit de venir avec elle chercher leur petit frère.

Ils courent à toute vitesse, montant les marches deux par deux.

Ils arrivent dans la chambre de Théo. Les cris du bébé résonnent dans la pièce. Lilou se précipite devant le berceau. Théo est tout rouge, ses larmes n’arrêtent pas de couler. Lilou le prend dans ses bras. Tout à coup, le bruit d’une explosion retentit. Un caillou vient briser la vitre de la chambre. Il y a des morceaux de verre partout. Alertés, Lilou et Florent se précipitent à la fenêtre.

Ils voient leur mère qui les regarde. Son visage est défiguré. Sa peau très blanche est arrachée. Ses yeux sont grands ouverts. Il y a du rouge autour de sa pupille. Elle bave une chose visqueuse et verdâtre. C’est elle qui a jeté le projectile.

Pris de panique, les enfants redescendent au rez-de-chaussée. Lilou pense pouvoir les faire sortir en passant par la cuisine située à l’arrière de la maison.

Dans le salon, une épaisse fumée noire a envahi la pièce. Des meubles fondent. D’autres craquent à cause des flammes. Ils noircissent et s’effondrent avant de prendre feu. La télévision grésille puis explose en faisant un bruit de bombe. Des morceaux volent de partout. Des étincelles éclatent dans tout le salon. Des projectiles d’électricité sautent de partout. Les flammes deviennent de plus en plus grandes, plus chaudes et de plus en plus insoutenables. La fumée, encore plus noire. Son odeur est insupportable. Lilou tousse. Théo et Florent ont du mal à respirer. Lilou prend une couverture et la met sur la bouche de ses frères pour leur éviter d’avaler la fumée. Ils ne cessent de pleurer. Lilou ne sait pas quoi faire pour les calmer. Elle tremble de peur.

Florent veut retourner dans sa chambre pour aller récupérer sa peluche, mais Lilou le retient par le bras.

– N’y va pas ! lui dit-elle. C’est trop dangereux ! Tu risques de mourir ! Viens avec moi, je te rachèterai la même !

Lilou emmène ses deux frères.

Une fois dans la cuisine, ils se dirigent directement vers la porte d’entrée, mais celle-ci est fermée. Florent voit la petite trappe par laquelle sortait Noby. Il le dit à Lilou, qui décide de passer par là pour s’enfuir. Florent et elle se mettent à genoux et forment une chaîne, s’apprêtant à passer en rampant par le petit passage. Une fois dehors, Lilou sait ce qu’ils feront : ils iront se cacher dans le cabanon au fond du jardin.

Les enfants s’agenouillent et s’apprêtent à ramper… mais ils voient la patte d’un chien qui gratte la trappe de ses griffes acérées. Noby les attend juste derrière !

– Il va entrer pour nous dévorer ! s’écrie Florent.

Pris de panique, Lilou et lui reviennent en courant dans le salon, mais celui-ci est complètement en feu. Les flammes les bloquent. Ils veulent faire marche arrière, mais la cuisine est en feu. Ils se retrouvent bloqués au milieu de la pièce. Toute la maison brûle. La chaleur devient insupportable. Ils s’accroupissent et se mettent à hurler. Au loin, Lilou entend les sirènes de police et des pompiers. La petite est soulagée, on vient les sauver, elle et ses frères…

Mais, au même moment, un morceau du plafond tombe devant eux. Des flammes les enveloppent !

Lilou se dépêche de sortir les trois pilules magiques qui lui restent et qui sont toujours dans sa poche depuis l’enterrement de sa mère. Elle en donne une à Florent, puis en met une dans la bouche de Théo. Elle prend la dernière. Personne ne peut les aider. Ils prennent feu petit à petit, leur peau brûle lentement et fond petit à petit. L’odeur de leur chair brûlée envahit la maison.

Épilogue

Réalité…

Lilou se réveille en panique.

Elle dormait tranquillement dans la voiture de son père. Arnaud est en train de conduire.

– Ta mère nous attend à la maison, dit-il à sa fille. Tu sais que tu lui manques beaucoup ? Elle cuisine sûrement un festin pour toi !

Lilou a fait un sale rêve. Dans sa tête, tout est confus. Les scènes se bousculent. Elle les voit encore. Elle se confrontait à une attaque de morts-vivants. Il y avait un homme en rouge et noir qui lui avait donné des pilules magiques permettant de revenir à la vie, et son chien, Noby, qui était pris d’une envie obsessionnelle de sang. Il y avait du sang, des boyaux sur le sol, puis son poisson rouge qui flottait dans l’eau.

– J’ai fait un terrible cauchemar, papa, commence Lilou.

– Je ne veux rien savoir, lui répond son père. Ça suffit !

Encore des histoires d’animaux morts, se dit-il.

Lilou est en convalescence dans un hôpital psychiatrique depuis plus d’un an. En effet, elle passait toutes ses journées à entasser des cadavres d’animaux morts dans sa chambre. Elle les habillait et leur parlait la nuit. Depuis quelques mois, son psychologue a vu de grands progrès chez elle. Il l’autorise à passer certains week-ends ou certaines des fêtes en famille. Ses parents ont eu l’autorisation de la sortir pour fêter Halloween.

– Ferme tes yeux, s’adoucit Arnaud, et dis-toi qu’on va passer un moment inoubliable en famille…

Lilou obéit. Elle pose la tête sur la vitre de la voiture et ferme les yeux. Elle pense à sa mère, elle pense à son frère, à son chien. Et à Némo, son petit poisson rouge. Sa famille lui manque tellement !

Elle se rendort paisiblement.

Une petite secousse réveille Lilou. La voiture de son père s’est arrêtée.

La fillette ouvre les yeux et aperçoit sa belle maison. Le parterre de plantes vivaces qui entoure le jardin, les petites marguerites sur la pelouse bien verte et l’allée de cailloux blancs et gris qui mène chez elle.

Lilou s’imagine très bien sa balançoire, qui bouge au gré du vent de l’autre côté de la maison, où se trouve aussi le chalet. C’est dans ce cabanon que sont rangés tous ses jouets et ceux de son frère. Il y a également la terrasse, qui rejoint la porte de cuisine. Quand Lilou se trouve au fond du jardin, elle peut apercevoir les velux de sa chambre et de celle de son frère, Florent.

Aujourd’hui, tout est prêt pour Halloween.

Des citrouilles sont posées de chaque côté de l’allée de cailloux. Sur la façade, un balai de sorcière est suspendu et se balance le long du mur. Des araignées géantes en plastique, avec leur toile, occupent les rebords des fenêtres. Sur l’un d’entre eux, deux harpies fixent les personnes qui entrent dans la maison ou en sortent. Il y a des squelettes dans la pelouse. Ainsi que des têtes de mort qui tournent sur elles-mêmes. Lorsque l’on regarde dans leur direction, elles stoppent tout mouvement.

Lilou est heureuse de découvrir toutes ces décorations.

Son père et elle descendent de voiture.

La porte d’entrée s’ouvre, et Louise apparaît.

Des larmes coulent sur les petites joues de Lilou. La fillette saute au cou de sa maman et l’embrasse. Tout émue, elle pleure dans ses bras.

Florent est à la fenêtre du salon, il porte un drap blanc sur lui. Il descend à toute allure pour sauter dans les bras de sa sœur, qu’il n’a pas vue depuis un mois.

– Lou, tu m’as manqué ! lui dit-il.

– Toi aussi, tu m’as tellement manqué, lui répond Lilou qui le serre contre elle.

Après ces quelques scènes d’amour et d’affection, la fillette rentre chez elle. Tout de suite, elle va voir son poisson rouge. Elle a peur que son rêve ne soit réel. Elle a peur de le retrouver mort.

Mais Némo est bien vivant.

– Oh, qu’il est beau ! s’enthousiasme-t-elle. Je suis super heureuse de te revoir, Némo !

Oh, qu’elle est attachée à lui ! Elle est rassurée, car il va bien.

Une ombre traverse alors la cuisine, à toute vitesse.

C’est Noby !

Arrivé devant sa petite maîtresse, le chien de la famille se roule au sol, puis se met sur le dos. Lilou le caresse, il se tortille sous la petite main de sa maîtresse en couinant de joie.

* * *

Le repas des retrouvailles s’achève. Il est déjà tard, Lilou est fatiguée. Elle peine à atteindre le salon tellement elle est épuisée. Elle se laisse tomber dans un des fauteuils. Noby, lui, est toujours très heureux de la revoir. Il bat de la queue, aboie et court partout dans la maison.

Florent va voir sa sœur. Il la fait rire en lui faisant des grimaces, puis il la chatouille.

– Arrête ! Arrête, Florent ! lui dit Lilou en rigolant. Je suis fatiguée…

Leur mère s’approche et dit à Florent :

– Flo, il est l’heure d’aller te coucher.

Tout excité à l’idée de frapper aux portes le lendemain, Florent se précipite dans sa chambre.

Puis, Louise dit à sa fille chérie, d’un air apaisant :

– Allez, Princesse, pour toi aussi, il est l’heure d’aller au lit.

Lilou ne veut pas monter se coucher, elle veut encore regarder la télévision et s’amuser avec Noby.

– Demain, tu dois être en forme, car tu devras aller chercher des bonbons à chaque maison, la convainc sa mère. Une longue journée t’attend…

– D’accord, oui, maman… Je vais aller faire dodo… Mais, demain matin, je mets tout de suite mon déguisement pour être sûre d’être prête. Tu vas être contente !

– Oui, si tu veux, ma chérie. Je t’aiderai à l’enfiler, mais ne salis pas ton déguisement quand tu déjeuneras.

Avant de rejoindre sa chambre, Lilou demande d’un air suppliant :

– Noby peut dormir avec moi ? J’aime pas la nuit, j’ai peur d’être toute seule, j’entends souvent des bruits bizarres. J’ai peur qu’un monstre vient me chercher. Nono me rassure.

Louise embrasse sa fille.

– D’accord, ma chérie. Allez, fais de beaux rêves, à demain.

– Merci, toi aussi fais de beaux rêves. Je t’aime fort, maman.

Lilou fait un dernier câlin à sa mère, puis prend son petit chien par le collier et le tire jusqu’à l’étage. Une fois dans sa chambre, elle le lâche. Noby file directement sous le lit.

La fillette s’allonge sous ses couvertures, mais elle sait qu’elle n’arrivera pas à dormir. Elle met ses deux mains derrière la tête et repense au mauvais rêve qu’elle a fait dans la voiture.

Punaise ! pense-t-elle. J’ai l’impression que ça s’est déjà passé. Mais si je le dis à papa et à maman, ils ne me croiront pas. Ils me diront que c’est encore à cause de ma maladie.

Ces derniers temps, elle fait ce cauchemar de plus en plus souvent, et les pilules magiques du docteur ne font aucun effet. Elle ne comprend pas ce qui lui arrive.

Finalement, elle ferme la lumière et s’endort paisiblement peu de temps après, un petit sourire au coin de la bouche.

Au petit matin, Lilou se réveille. Les oiseaux chantent à la fenêtre de sa chambre, la lumière du soleil brille déjà. La fillette est contente, car c’est le jour d’Halloween !

Elle se lève, prête à enfiler son costume de sorcière ! Mais, avant : elle fait un détour par la cuisine pour prendre son petit déjeuner et dire bonjour à Némo. Il faudra aussi qu’elle lui donne à manger. Ainsi qu’à Noby.

Arrivée dans la cuisine, son regard se pose immédiatement sur l’aquarium. Némo est sur le dos ! Il ne bouge plus ! De petites larmes dévalent les joues de la pauvre petite. La fillette va vite réveiller sa mère en criant.

FIN ?